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  • Le synchrotron Soleil voit le jour à deux pas de Versailles

    medium_synchrotron.jpg"CELA faisait un moment que l'on n'entendait plus parler de Soleil. L'entrée en scène, à la fin 2002, des engins de chantier sur le site de l'Orme des Merisiers, à Saint-Aubin (Essonne), avait fini par faire oublier les violentes polémiques suscitées par ce bel anneau de béton de 364 mètres de circonférence, que le président de la République, Jacques Chirac, a inauguré ce matin.

    Pourtant, c'est peu dire que ce grand instrument, destiné à sonder la matière grâce à la lumière ultrabrillante - le fameux rayonnement synchrotron - émise par des électrons lancés à la vitesse de la lumière (voir article ci-dessous), a bien failli ne jamais voir le jour.

    Le 2 août 1999, alors que 70 millions de francs (un peu plus de 10 millions d'euros) avaient déjà été consacrés au projet, en gestation depuis neuf ans, Claude Allègre décida brusquement de tout arrêter. Par souci d'économie, le futur synchrotron ne devait plus être franco-français mais franco-britannique, sous la forme d'une prise de participation minoritaire dans le projet Diamond, implanté à Oxford en Angleterre. Exit Soleil... Le bouillant ministre socialiste de la Recherche avait aussitôt provoqué un tollé dans la communauté scientifique et s'était mis à dos plusieurs de ses amis politiques, comme le président de la région Ile-de-France, Jean-Paul Huchon, prêt à casser sa tirelire pour héberger Soleil chez lui.

    Il faudra attendre avril 2000 pour que Roger-Gérard Schwartzenberg, à peine installé dans le fauteuil de Claude Allègre, rouvre le dossier écarté par son prédécesseur. « Du fait de la très forte demande d'accès, le projet franco-britannique Diamond risque de ne pas suffire », expliquait-t-il en reprenant les conclusions d'un rapport parlementaire publié quelques semaines plus tôt. De fait, l'ESRF, le synchrotron européen de Grenoble, est déjà saturé, le Lure d'Orsay - que Soleil doit remplacer - est en fin de vie, et même en disposant d'un accès privilégié à Diamond, les scientifiques français devront louer du « temps de faisceau » dans les autres synchrotrons européens (Allemagne, Italie, Suède, Suisse), sans être sûr d'en obtenir...

    De nombreuses applications


    Car en l'espace d'une décennie, les besoins n'ont cessé de croître pour des applications sans cesse plus nombreuses. D'abord utilisée par les physiciens, la lumière synchrotron est de plus en plus prisée par les chimistes et surtout les biologistes dans des domaines variés qui vont de la médecine, à la science des matériaux en passant par la géophysique, la lithographie, l'électronique, et même l'archéologie. Certains cancérologues ont, par exemple, recours aux infrarouges pour effectuer des diagnostics très précoces en vérifiant si l'ADN prélevé sur les cellules de leurs patients est sain ou non.

    Restait pour M. Schwartzenberg à affronter la bataille qui fit rage entre les dix régions candidates. Le 11 septembre 2000, le choix s'est finalement porté sur l'Île-de-France, dont les collectivités territoriales - Région et département de l'Essonne - financent plus de 70 % du coût total de l'opération estimé à 280 millions d'euros. En outre, c'est elle qui concentre les chercheurs les mieux qualifiés pour mener le projet à bien.

    Le résultat est à la hauteur des espérances. La machine d'une puissance de 2,75 gigaélectrons-volts, accueillera d'ici à 2009, un total de 24 lignes de lumières disposées tout autour de l'anneau de stockage où les scientifiques pourront mener leurs expérimentations. Mais il y a la place pour en installer 19 de plus, par la suite, si les financements suivent. La palette de lumière disponible va de l'infrarouge lointain (300 micromètres de longueur d'onde) aux rayons X « durs » (0,03 milliardième de mètre), offrant une gamme d'utilisation étendue.

    Le démarrage retardé


    « Soleil ne risque pas d'être sous-utilisé, se réjouit Denis Raoux, le directeur général de la société de droit privé Synchrotron Soleil, détenue à hauteur de 72 % par le CNRS et 28 % par le CEA. Avant même de démarrer, nous sommes déjà en surréservation de plus du double par rapport au temps de faisceau disponible ! »

    Fait notable : si la demande émane surtout de chercheurs académiques (aux trois quarts français) pour qui l'accès est gratuit sous réserve qu'ils publient leurs résultats in extenso, de plus en plus d'industriels font appel au synchrotron. À terme, il est prévu de leur dédier, moyennant rétribution, 2 à 3 lignes de lumières de Soleil pour une utilisation de 10 % du temps de faisceau (4 % actuellement à Grenoble).

    Seule ombre au tableau, le début des expérimentations, initialement prévu en janvier, sera retardé de six à huit semaines suite à des « malfaçons » repérées cet automne sur l'un des circuits de refroidissement des accélérateurs. Mais selon Denis Raoux, « cette péripétie, inévitable dans ce genre de réalisation, ne remet pas en cause la qualité de l'instrument : l'anneau fonctionne à pleine puissance depuis septembre et le faisceau d'électrons est d'une stabilité remarquable »."

    Source : Le Figaro